Rumeurs autour de la détection d'ondes gravitationnelles et de contreparties électromagnétiques émises par la coalescence de deux étoiles à neutrons (*****))
Au moins trois canaux de communication anglophones (ici, là et encore là) ont diffusé hier 23 août 2017 un faisceau d'informations selon lequel il y a des chances que l'observatoire américain de détection d'ondes gravitationnelles LIGO qui finit demain 25 août une campagne de mesures (coordonnée avec le détecteur européen franco-italien Virgo depuis le 1er août) ait enregistré autour du 18 de ce mois un signal pouvant être celui produit par la coalescence de deux étoiles à neutrons situées possiblement à environ 134 millions d'années de lumière de la Terre dans la galaxie NGC4993. Par ailleurs il est établi que les télescopes spatiaux Hubble et Chandra (qui observent l'univers respectivement dans le domaine proche infrarouge et celui des rayons X) ont été pointés dans la direction de cette galaxie (dès) le 2218 et le 19 et il semblerait aussi que le réseau de très grands télescopes terrestres européen VLT se soit intéressé à cette région du ciel pendant le week-end. Il est donc possible qu'une contrepartie électromagnétique à une détection d'ondes gravitationnelles ait été observée pour la première fois. A tout le moins peut-on supposer que la source du signal gravitationnel a été localisée avec une précision encore inégalée*.
Le directeur de LIGO, interrogé par la revue scientifique américaine New Scientist n'a ni confirmé ni infirmé ces informations affirmant simplement:
La seconde et excitante campagne de mesure O2 tire à sa fin le 25 août. Nous envisageons de poster une mise à jour de première importance à ce moment là.
(A very exciting O2 Observing run is drawing to a close August 25. We look forward to posting a top-level update at that time)
Je rappelle qu'à ce jour le consensus dans la communauté scientifique est que trois signaux clairs d'ondes gravitationnelles ont été détectés par LIGO. La forme du signal suit dans les trois cas les prévisions de la théorie de la relativité générale proposée par Einstein en 1915 à condition de modéliser l’événement à l'origine du signal par la coalescence (collision + fusion) d'une paire de trous noirs de quelque dizaines de masses solaires. Je signale néanmoins que des interrogations sérieuses légitimes*** étayées par une étude dont la rigueur scientifique a été reconnue existent encore sur l'origine des signaux identifiés par LIGO.
Au lecteur qui s'offusquerait de la mise en ligne ici de ce qui n'est qu'une rumeur-du-web je me permettrais de le convier à (re)lire l'histoire de la diffusion de la découverte directe des premières ondes gravitationnelles et à voir dans ce billet une tentative modeste non seulement de propagation de l'information mais aussi de concentration, de filtrage et d'amplification voire de rétroaction s'il se joint au jeu...
*mise à jour de 13h : il se trouve que le télescope spatial Fermi qui opère dans le domaine le plus énergétique du spectre électromagnétique a détecté et localisé un sursaut gamma baptisé GRB170817A à 12h41 (le 17 août) qui pourrait être "l'image" associée au signal gravitationnel en question; ce serait alors la coïncidence entre ces deux signaux qui a conduit à il est pour l'heure impossible de savoir si l'exploration ultérieure par Hubble et Chandra de la zône du ciel autour de la galaxie NGC4993 a été motivée uniquement par la détection du sursaut gamma en question ou aussi par une alerte lancée par la collaboration LIGO-Virgo suite à l'identification d'un signal potentiel d'ondes gravitationnelles autour de la date du 17.
**mise à jour du lundi 28 août : l'astrophysicien américain J. Craig Wheeler, après avoir été à l'origine de la fuite sur Twitter le 18 a regretté son geste cinq jours après, écrivant "Que se soit bien ou mal je n'aurais pas dû envoyer ce tweet. LIGO mérite de faire l'annonce quand il le jugera approprié..."
Le site du satellite Hubble qui publie chaque jour une image de ce qu'il est "en train" d'observer (avec néanmoins un décalage de trois ou quatre jours entre la date de publication et la "prise de vue") a lui aussi fait en quelque sorte machine arrière semble-t-il en faisant disparaître de son compte tweeter une image de la galaxie NGC4993 qui était intitulée : "I am looking at the Star BNS [Binary Neutron Star]-MERGER with Space Telescope Imaging Spectrograph for on Tue 22 August 2017..." Néanmoins il a depuis publié à nouveau à plusieurs reprises la même image de la galaxie avec cette fois une mention commençant par : "I am looking at the Star SHORT-GRB [Gamma Ray Burst]-170817A ..." ce qui signifie qu'un précieux temps de mesure a bien été attribué à différentes équipes pour suivre à tout le moins les contreparties dans le domaine optique du sursaut gamma mis en évidence le 17 par le satellite Fermi (pour plus de détail voir les résumés publiques ci-joints en anglais des recherches en cours: 14804, 14850, 15346, 15382).
Dernière mise à jour (mercredi 30 août) :
L'annonce officielle de la première détection directe d'ondes gravitationnelles par les deux observatoires LIGO en février 2016 arriva avec un délai d'environ six mois par rapport à la première rumeur ou fuite par un physicien théoricien sur la twittosphère. C'est le temps nécessaire aux scientifiques concernés pour transformer leurs données en information (mon expérience passée de blogueur suivant la découverte du boson de Higgs ou la première détection d'ondes gravitationnelles conduit au même ordre de grandeur temporel).
Au vue des données évoquées ci-dessus il semble raisonnable d'envisager qu'une semblable histoire se reproduise sous nos yeux avec cette fois la possible première identification d'une unique source astrophysique responsable de l'émission dans un court intervalle de temps d'un signal électromagnétique avéré (sursaut gamma court officiellement nommé GRB170817A) et d'un signal d'ondes gravitationnelles potentiel détecté en concordance par les 3 observatoires disponibles LIGO et Virgo selon la déclaration de la collaboration scientifique du 25 août:
Pour terminer ce billet en accord avec la philosophie originelle de ce blog voici quelques vers (que l'on espère pas tout à fait de mirliton) inspirés des Correspondances de Beaudelaire...
... et surtout une belle anagramme de circonstance (due toujours et encore à Jacques Perry-Salkow):
*** PS: les doutes de certains physiciens sur la réalité de la détection des "vent d'orages lointains" portent sur la manière dont les observateurs d'ondes gravitationnelles extraient leurs signaux astrophysiques de la masse confuse des données (elles sont tellement bruitées et les sources du bruit sont tellement nombreuses et donc non modélisables que le signal est recherché en temps réel "à l'aveugle" de façon automatisée par de puissants ordinateurs qui comparent des échantillons de données à des centaines de milliers de signaux "théoriques" modèles ou templates en anglais****). De façon piquante il semblerait qu'une réponse possible à une question essentielle soulevée par les sceptiques soit à chercher dans des parasites produits par des orages bien plus proches ... mais ceci est une autre histoire racontée ailleurs.
**** Selon un membre de la collaboration Virgo rencontré aujourd'hui (30 août) le temps de latence entre la réception d'un signal et son identification automatisée comme potentiel candidat d'ondes gravitationnelles est de l'ordre de 40 secondes après quoi un message d'avertissement est lancé à différents membres de la collaboration LIGO-Virgo qui se réunissent en téléconférence pour valider ou non le résultat des ordinateurs (au vue de paramètres indépendants des algorithmes) et avertir les astronomes qui observent les autres messagers de l'univers que sont les photons, les neutrinos et autres rayons cosmiques. Le temps minimal de latence de cette décision humaine serait de l'ordre de 40 minutes... L'avenir dira le temps nécessaire à la communauté scientifique pour éventuellement faire du candidat peut-être déjà étiqueté LVT170817, pour LIGO-Virgo Trigger (=déclencheur) du 17 août 2017, ce qui restera dans le grand livre de l'astronomie sous le nom de GW170817.
*****Mise à jour du 5 octobre 2017 :
Il n'est pas impossible que le premier signal gravitationnel détectable (voire déjà détecté) avec une contrepartie électromagnétique soit issu de la coalescence d'une étoile à neutron avec un trou noir dans la mesure où une telle configuration est a priori un peu plus facile à détecter que celle mettant en jeu deux étoiles à neutrons (l'amplitude du signal croît avec la somme des masses des deux objets à l'origine du signal et la masse d'un trou noir stellaire peut être nettement plus grande que celle d'une étoile à neutron quie ne peut pas dépasser deux ou trois masses solaires).
Lors d'une conférence de presse qui s'est tenue au MIT mardi 3 octobre pour célébrer l'annonce de la remise du prix Nobel de physique 2017 aux physiciens américains Robert Weiss, Barry C. Barish et Kip S. Thorne pour leur contribution décisive à la réalisation du détecteur LIGO et à l'observation des ondes gravitationnelles, le premier des récipiendaire a laissé entendre de façon assez claire que l'annonce d'une nouvelle avancée liée à ce détecteur serait faite le 16 octobre (probablement lors d'une conférence qui se tiendra à Baton Rouge).
**mise à jour du lundi 28 août : l'astrophysicien américain J. Craig Wheeler, après avoir été à l'origine de la fuite sur Twitter le 18 a regretté son geste cinq jours après, écrivant "Que se soit bien ou mal je n'aurais pas dû envoyer ce tweet. LIGO mérite de faire l'annonce quand il le jugera approprié..."
Le site du satellite Hubble qui publie chaque jour une image de ce qu'il est "en train" d'observer (avec néanmoins un décalage de trois ou quatre jours entre la date de publication et la "prise de vue") a lui aussi fait en quelque sorte machine arrière semble-t-il en faisant disparaître de son compte tweeter une image de la galaxie NGC4993 qui était intitulée : "I am looking at the Star BNS [Binary Neutron Star]-MERGER with Space Telescope Imaging Spectrograph for on Tue 22 August 2017..." Néanmoins il a depuis publié à nouveau à plusieurs reprises la même image de la galaxie avec cette fois une mention commençant par : "I am looking at the Star SHORT-GRB [Gamma Ray Burst]-170817A ..." ce qui signifie qu'un précieux temps de mesure a bien été attribué à différentes équipes pour suivre à tout le moins les contreparties dans le domaine optique du sursaut gamma mis en évidence le 17 par le satellite Fermi (pour plus de détail voir les résumés publiques ci-joints en anglais des recherches en cours: 14804, 14850, 15346, 15382).
Dernière mise à jour (mercredi 30 août) :
L'annonce officielle de la première détection directe d'ondes gravitationnelles par les deux observatoires LIGO en février 2016 arriva avec un délai d'environ six mois par rapport à la première rumeur ou fuite par un physicien théoricien sur la twittosphère. C'est le temps nécessaire aux scientifiques concernés pour transformer leurs données en information (mon expérience passée de blogueur suivant la découverte du boson de Higgs ou la première détection d'ondes gravitationnelles conduit au même ordre de grandeur temporel).
Au vue des données évoquées ci-dessus il semble raisonnable d'envisager qu'une semblable histoire se reproduise sous nos yeux avec cette fois la possible première identification d'une unique source astrophysique responsable de l'émission dans un court intervalle de temps d'un signal électromagnétique avéré (sursaut gamma court officiellement nommé GRB170817A) et d'un signal d'ondes gravitationnelles potentiel détecté en concordance par les 3 observatoires disponibles LIGO et Virgo selon la déclaration de la collaboration scientifique du 25 août:
Les collaborations scientifiques Virgo et LIGO ont effectué des observations depuis le 30 novembre 2016 dans la seconde campagne de mesures avec détecteur avancé dite «O2», à la recherche de signaux d'ondes gravitationnelles, d'abord avec les deux détecteurs LIGO, puis avec les instruments LIGO et Virgo fonctionnant ensemble depuis le premier août 2017. Certains candidats prometteurs d'ondes gravitationnelles ont été identifiés dans les données de LIGO et de Virgo lors de notre analyse préliminaire, et nous avons partagé ce que nous savons actuellement avec nos partenaires d'observation astronomique. Nous travaillons ardemment pour nous assurer que ces candidats sont de vrais événements gravitationnels et il faudra du temps pour atteindre le niveau de confiance requis pour apporter des résultats à la communauté scientifique et au grand public. Nous vous informerons dès que nous aurons des informations prêtes à partager.A dans six mois environ donc pour en savoir plus sur la nature physique de cet événement astronomique !
Pour terminer ce billet en accord avec la philosophie originelle de ce blog voici quelques vers (que l'on espère pas tout à fait de mirliton) inspirés des Correspondances de Beaudelaire...
Concordances
La cybersphère est une auberge espagnole,
Trop souvent en sortent de confuses paroles !
Pourtant de ce diffus bruit de fond médiatique
Émergent parfois des nouvelles scientifiques.
Comme de confus échos qui de loin se confondent
Dans une lumineuse et riche diversité,
Vaste comme le temps, l'espace et ses saveurs
Neutrinos, photons et gravitons se répondent.
... et surtout une belle anagramme de circonstance (due toujours et encore à Jacques Perry-Salkow):
ondes gravitationnelles = le vent d'orages lointains
*** PS: les doutes de certains physiciens sur la réalité de la détection des "vent d'orages lointains" portent sur la manière dont les observateurs d'ondes gravitationnelles extraient leurs signaux astrophysiques de la masse confuse des données (elles sont tellement bruitées et les sources du bruit sont tellement nombreuses et donc non modélisables que le signal est recherché en temps réel "à l'aveugle" de façon automatisée par de puissants ordinateurs qui comparent des échantillons de données à des centaines de milliers de signaux "théoriques" modèles ou templates en anglais****). De façon piquante il semblerait qu'une réponse possible à une question essentielle soulevée par les sceptiques soit à chercher dans des parasites produits par des orages bien plus proches ... mais ceci est une autre histoire racontée ailleurs.
**** Selon un membre de la collaboration Virgo rencontré aujourd'hui (30 août) le temps de latence entre la réception d'un signal et son identification automatisée comme potentiel candidat d'ondes gravitationnelles est de l'ordre de 40 secondes après quoi un message d'avertissement est lancé à différents membres de la collaboration LIGO-Virgo qui se réunissent en téléconférence pour valider ou non le résultat des ordinateurs (au vue de paramètres indépendants des algorithmes) et avertir les astronomes qui observent les autres messagers de l'univers que sont les photons, les neutrinos et autres rayons cosmiques. Le temps minimal de latence de cette décision humaine serait de l'ordre de 40 minutes... L'avenir dira le temps nécessaire à la communauté scientifique pour éventuellement faire du candidat peut-être déjà étiqueté LVT170817, pour LIGO-Virgo Trigger (=déclencheur) du 17 août 2017, ce qui restera dans le grand livre de l'astronomie sous le nom de GW170817.
*****Mise à jour du 5 octobre 2017 :
Il n'est pas impossible que le premier signal gravitationnel détectable (voire déjà détecté) avec une contrepartie électromagnétique soit issu de la coalescence d'une étoile à neutron avec un trou noir dans la mesure où une telle configuration est a priori un peu plus facile à détecter que celle mettant en jeu deux étoiles à neutrons (l'amplitude du signal croît avec la somme des masses des deux objets à l'origine du signal et la masse d'un trou noir stellaire peut être nettement plus grande que celle d'une étoile à neutron quie ne peut pas dépasser deux ou trois masses solaires).
Lors d'une conférence de presse qui s'est tenue au MIT mardi 3 octobre pour célébrer l'annonce de la remise du prix Nobel de physique 2017 aux physiciens américains Robert Weiss, Barry C. Barish et Kip S. Thorne pour leur contribution décisive à la réalisation du détecteur LIGO et à l'observation des ondes gravitationnelles, le premier des récipiendaire a laissé entendre de façon assez claire que l'annonce d'une nouvelle avancée liée à ce détecteur serait faite le 16 octobre (probablement lors d'une conférence qui se tiendra à Baton Rouge).
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